Creil

La ville de Creil, ancien gué sur la rivière Oise, s’est développée en contrebas d’un plateau dominant la vallée. Ce plateau composé de calcaire du Lutétien a favorisé le développement de l’extraction de la pierre.

 

A l’origine du nom de Creil, il y aurait plusieurs termes « Craig », « Criolo », « Credilium » qui signifient rocher, roc. En celtique, on l’écrivait « Cruth » et cela désignait les grottes. En effet, tout ce qui se trouvait en dehors de la ville fortifiée était autrefois assimilé à des carrières de pierre, exploitées dès l’époque gallo-romaine. De nombreux monuments, édifices et bâtiments creillois ont été construits en pierre : l’église Saint-Médard, l’ancienne église Saint-Evremond, l’ancienne usine de faïence, le château ou encore l’hôtel de ville. Mais les liens entre Creil et le monde carrier ne s’arrêtent pas là.

 

Creil abrite plusieurs types de cavités : des galeries souterraines liées à la défense passive durant la Seconde Guerre mondiale, des carrières liées à l’exploitation de la pierre de l’Oise dans la rue du Plessis Pommeraye et des habitations troglodytiques dites « tufs » (référence au tuf, roche tendre dans laquelle étaient aménagées ces maisons). Le tissu urbain creillois est encore marqué par un passé de carrier. On le remarque notamment dans le nom des rues : « rue du haut des tufs » où les vestiges des habitations troglodytiques sont encore visibles, le « passage des carriers » dans le quartier du Moulin près duquel on peut encore voir le front de taille et les traces des outils qui ont servi à extraire la pierre. Ce passage servait autrefois à acheminer les pierres extraites vers les voies de chemin de fer en passant par la rue des pierres. Enfin, l’appellation de certains quartiers rappelle ce passé : les cavées qui signifient « chemin creux » sont les témoins de la présence de la pierre à Creil.

 

Creil a beaucoup souffert lors de la Seconde Guerre mondiale et de nombreux dégâts ont été causés par les bombardements de 1944 : le centre-ville, la place Carnot et la gare ont été entièrement détruits. La reconstruction de la ville fut confiée à l’urbaniste Philippot et s’achèva en 1963. Les immeubles en pierre de taille qui longent la place témoignent encore de cet aménagement et donnent une unité architecturale complète avec la rue de la République et l’avenue Jules Uhry.

 

De nouveaux quartiers furent construits à partir des années 1950. Ils accueillaient de grands ensembles pour la nouvelle population venue travailler dans l’industrie creilloise. Les architectes ont utilisé de la pierre de placage pour habiller les immeubles du quartier des Cavées de Senlis et de Paris, et le quartier Guynemer.

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Les habitations troglodytiques possèdent des appellations différentes dans la région :

Tufs à Creil ;
Catiches dans le Nord ;
Creutes dans le Soissonais ;
Les muches dans la Somme (exemple : Naours avec ses galeries d’ex
ploitation qui deviendront des refuges souterrains) ;
Les boves dans le Val d’Oise.
Dans le recensement de 1851, on comptait dans la rue du haut des tufs et dans la rue du bas des tufs 110 habitants répartis en 32 ménages sur 4 500.
Un bon nombre d’habitants exerçaient des métiers peu rémunérés tels que, pour les hommes, carriers, manœuvriers, faïenciers et ménagères pour les femmes. Les employés les plus qualifiés se trouvaient dans la rue du haut des tufs et les moins qualifiés dans la rue du bas des tufs. En 1901, le quartier comptait 200 personnes réparties en 78 foyers, sur une population totale d’environ 8 500 habitants.

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Cricri, de son vrai nom Louis Carnavin, est né le 2 janvier 1857 à Graçay, dans le Cher. Il était ouvrier boulanger, d’où lui vient son surnom : les cri-cri sont les grillons qui se trouvaient dans la farine des boulangers.
Il se réfugia dans une grotte vers 1908, située sur les coteaux, entre l’actuel IUT et les jardins familiaux, pour y vivre une vie de marginale. Le lieu prit rapidement le surnom de « côte à cricri » ou « grotte à cricri ».
La grotte se composait d’une grande pièce d’entrée avec une table et des bancs de pierre, d’une petite cuisine et d’une chambre à coucher, au fond, partiellement murée.
Cricri n’hésitait pas à se faire prendre en photographie et il récupérait les clichés imprimés sous forme de cartes postales pour les revendre.
En 1919, il fut expulsé de la grotte et se réfugia dans une nouvelle grotte située chemin du stand de tir, dans le quartier des tufs. Il y mena une vie misérable jusqu’à son décès, le 26 décembre 1926. Son corps fut retrouvé quatre jours après sa mort dans une carrière non loin de là.

La gare de Creil et la ligne de chemin de fer Paris-Lille ont été ouvertes en 1846. Le tracé d’origine suivait la rive droite de l’Oise en passant par Saint-Leu-d’Esserent, en partie sur le trajet actuel de la ligne « Creil-Pontoise ». La voie Paris-Creil via Chantilly telle qu’elle est aujourd’hui fut inaugurée en 1859. Elle a permis de relier Paris à Creil en moins d’une heure. Le chemin de fer servait à l’approvisionnement des entreprises en charbon et en matières premières, ainsi qu’au transport de la pierre de l’Oise vers la Capitale.
Jusqu’en 1914, la gare de Creil était constituée d’un bâtiment destiné aux voyageurs. L’ensemble était complété par les installations nécessaires au bon fonctionnement du chemin de fer : buffet de la gare, hall des marchandises, quais, voies, lampisterie ou encore remise à wagons.
Si la gare de Creil a peu souffert du passage de la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale lui fut fatale.

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La maison Gallé-Juillet située sur le domaine de l’ancien château a appartenu à la famille Gallé-Juillet. Berthe Gallé, offrit cette demeure à la ville de Creil en 1929 au décès prématuré de l’unique enfant de la famille, Maurice Gallé, lors de la Première Guerre mondiale. Le musée conserve le charme et l’ambiance des grandes demeures bourgeoises et donne un aperçu de la vie quotidienne d’une famille au XIXe siècle. De nombreux meubles et tableaux remarquables, datant de l’époque Louis XIII au début du XXe siècle, sont exposés au musée Gallé-Juillet.
Les ruines du château fort sont classées au titre des Monuments Historiques depuis 1923. Il ne reste actuellement qu’une partie de l’aile Nord du château et la tour accolée à la maison en briques rouges devenue maison de la faïence en 2010. La grande salle médiévale a pu être préservée au rez-de-chaussée de l’aile Nord. Elle a changé plusieurs fois de destination. Elle servit par exemple d’atelier de menuiserie au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, puis de caserne des pompiers jusqu’en 1976.

Au XIXe siècle, l’hôtel de ville se situait dans la cour de l’ancien château fort de la ville. Le conseil municipal décida de la construction d’un nouvel établissement en 1899. L’hôtel de ville fut édifié dans un style néo-Renaissance par l’architecte Elphège Portemer sur les plans de l’architecte Paul Heneux, premier prix du concours lancé à cette occasion. Les travaux durèrent de 1901 à 1903. C’est la roche dite de vergelé qui fut utilisée, extraite directement des carrières de Saint-Maximin. Les armoiries de la ville, visibles sur le fronton de la mairie, reproduisent le modèle crée en 1862 à la demande du maire, Jules Juillet : elles sont dites d’azur au chevron d’or, chargées de trois molettes de sable, et accompagnées de trois roses du second, deux en chef et une en pointe.

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Le tuf désigne un habitat souterrain ou creux, situé dans la roche. Ils sont sensibles aux conditions climatiques et aux interventions humaines. On utilise aussi le terme « troglodyte » qui vient du grec et signifie « caverne » et « pénétrer dans, plonger ».
Le terme « tuf » désigne également le type de roche qui compose le terrain, qui peut être d’origine volcanique ou sédimentaire, de couleur allant du gris au jaune.
Les tufs de Creil étaient utilisés de la fin du XIXe siècle au début du XXe siècle. Ils étaient occupés par les plus modestes par nécessité, puisqu’il s’agissait de logements plus économiques.
Les tufs sont encore visibles à Creil mais les cavités ont été condamnées car elles étaient devenues trop dangereuses pour être habitées.
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Description d’un tuf :

Dans son ouvrage sur l’histoire de la ville de Creil, paru en 1883, le Docteur Boursier décrit ces habitations ainsi : « Elles sont spacieuses, profondes, munies, presque toutes, d’une arrière pièce à l’usage des enfants et des provisions. L’ouverture est fermée par une maçonnerie plus ou moins régulière dans laquelle sont aménagée une fenêtre et une porte. La voûte est percée pour le passage de la fumée. Ces demeures sont fraîches en été et chaudes en hiver et ne sont pas malsaines. »
En fait, malgré cette description flatteuse, ces habitations étaient humides et peu isolées contre les intempéries ce qui en faisait un habitat précaire utilisé seulement par des habitants ayant un faible revenu.

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Aux XIIe et XIIIe siècles, les Comtes de Clermont étaient puissants. Leur principauté, proche de Paris, était alors importante et riche. Le château était d’une qualité comparable à celle d’un château royal. Au XIVe siècle, le château fut transformé et modernisé pour le roi Charles V le Sage, et il devient par la suite un lieu de plaisance.
A la veille de la Révolution française, les constructions médiévales ont subi les affres du temps. Le Prince de Condé ordonna alors que le château soit en grande partie démonté. Les creillois ont pu alors réemployer les pierres de l’édifice pour construire leurs propres habitations. Aujourd’hui, l’essentiel des éléments architecturaux conservés du château date du XIIIe siècle. Il s’agit des vestiges du château des Comtes de Clermont à Creil. L’ancien château a été classé au titre des monuments historiques le 17 décembre 1923.
Plusieurs études ont été réalisées entre 2019 et 2021 afin d’en apprendre plus sur l’histoire du château : un diagnostic et une étude archéologique ont été menés par Nicolas Bilot du Service Départemental de l’Archéologie de l’Oise, et une étude historique par Morgan Hinard d’Aquilon.

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Le mot « cavée » signifie chemin creux. Les hauteurs de Creil ont en effet longtemps été exploitées pour leur pierre calcaire et leur sable, qui était notamment utilisé pour la verrerie.
Cette exploitation est officialisée par l’arrêté pris par le ministre secrétaire d’Etat au département de l’intérieur le 27 novembre 1824. Ainsi, Nicolas Martin Lambert, maître carrier à Creil, est ainsi autorisé à ouvrir une exploitation de pierres à bâtir par travaux souterrains, au lieu-dit de la Cavée de Creil, en 1828.
L’exploitation des carrières, d’abord souterraine puis à ciel ouvert, est particulièrement active au XIXe siècle : les cavées de Paris, Senlis, de la terrière, blanche, « Manéga », ou encore du Plessis-Pommeraye, abritent des carrières à ciel ouvert et des carrières souterraines. Leur exploitation a cessé au début du XXe siècle.
Même si plusieurs constructions voient le jour dans ce quartier dès le XIXe siècle, son développement urbain intervient principalement dans les années 1950. Il respecte l’esprit du quartier avec des ensembles utilisant de la pierre de taille.

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